Crise sanitaire et crise écologique

par Françoise BJ

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En ces temps de pandémie et de confinement, je reçois de nombreux messages de toutes sortes : avant-hier, un texte non signé développant la théorie que le coronavirus était une arme biologique lancée par les Chinois pour détruire l’économie mondiale et devenir les maîtres du monde !

Ce texte de science-fiction, qui aurait pu me faire sourire, m’a mise en colère.

Je me suis demandé comment ce genre de théories complotistes pouvait parvenir jusqu’à moi.

Sont-elles si répandues que ça ?

Oui ! La presse parle même d’une « infodémie » de thèses conspirationnistes, dans le monde entier, avec des variantes ; arme chimique, virus échappé des laboratoires chinois, américains, israéliens, et encore bien d’autres thèses, toutes plus extravagantes les unes que les autres…

Dans la période très spéciale que nous vivons, beaucoup de personnes, surtout des jeunes, sont constamment collés à leurs ordinateurs, sites et réseaux sociaux de toutes sortes et font circuler toutes sortes d’informations, reprenant et relayant souvent des « fake news » sans esprit critique, sans esprit scientifique… Ils se croient peut-être dans un roman de science-fiction (c’est vrai que ce qu’on vit ressemble tellement à un roman de science-fiction !) et toutes les thèses, les plus farfelues sont admises …

Beaucoup de mauvaise foi aussi. Toutes les erreurs commises (et il y en a eu beaucoup d’autant plus qu’on ne connaissait rien de ce nouveau virus) sont interprétées comme des mensonges, donc il ne faut pas croire ce que disent les responsables et les scientifiques… Par contre on croit à ces balivernes…

De nombreux journaux français donnent l’information qu’un quart des Français (27% des moins de 35 ans) croient à la fabrication du coronavirus en laboratoire…

Ce qui est encore plus grave, c’est que des politiques affirment que c’est possible, par exemple Marine Le Pen : « Personne ne sait ce qu’il en est », a-t-elle déclaré sur France Info le 7 avril. Cela est très inquiétant et irresponsable de la part d’une « responsable » politique…

              Dessin de Sanaga, source : Reporterre
              https://reporterre.net/

Jeudi soir à la télé allemande, j’ai écouté Dirk Steffens, un journaliste scientifique célèbre pour une excellente émission que j’ai souvent regardée sur la deuxième chaine (Terra X). Il a expliqué que des virus, il y a en a toujours eu, plus ou moins dangereux mais depuis une vingtaine d’années, de nouveaux virus, par l’intermédiaire d’animaux, se transmettent aux humains qui ne sont pas immunisés. Certains venant directement d’animaux sauvages donnent des maladies graves. Comme on le sait, c’est le cas du virus Covid 19 qui a été transmis des chauves-souris aux pangolins puis aux humains.

Selon Dirk Steffens, ce n’est pas seulement le contexte local (pangolins vivants sur un marché de Wuhan) qui permet la transmission de ce virus à l’homme, mais en général le manque d’espace pour les animaux sauvages qui se rapprochent des humains et peuvent donc les contaminer. Manque d’espace dû à la destruction des forêts, à l’agriculture intensive, à la surpopulation. L’élevage intensif (où les animaux manquent d’espace) représente aussi un risque.

C’est aussi ce que dit l’écologue de la santé Serge Morand, directeur de recherches CNRS-Cirad, pour qui la crise écologique crée la crise sanitaire. Ces 60 dernières années, on a assisté à l’augmentation de l’empreinte écologique, du nombre d’animaux domestiques, de l’urbanisation, des transports de marchandise, aériens et d’une globalisation affectant l’ensemble de la planète et des écosystèmes

De nombreuses voix s’élèvent pour déclarer l’urgence d’une politique écologique avec arrêt des destructions des forêts et d’élevages intensifs, diminution de l’agriculture intensive.

Il faut manger donc manger bio et moins de viande…

Il faut arrêter cette mondialisation effrénée qui s’est développée ces dernières années…

La crise sanitaire est une chance pour accélérer ce changement. Il faut repartir sur d’autres bases mais comment, quand on sait qu’il y aura une crise économique sans précédent et qu’on voudra une relance rapide.

Comment construire ce « Nouveau Monde plus soucieux de notre planète et de ses habitants » dont rêve Brigitte Beaudin ce matin dans notre blog.