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Vivre confinés
8 avril 2020

L'attente (3)

 

par Laurent L.


Durant quatre jours, face à la forêt tropicale, nous oublierons les affres de l’épidémie. Jusqu’à la réception de ce mail de l’ambassade, nous informant de la mise en place du plan de rapatriement des Français hors de France. Pas de précision, l’ambassade nous enjoint simplement de prendre contact avec Air France. Heureusement que j’avais acheté, cinq mois avant notre départ, des vols directs Air France qui étaient moins chers que les vols avec escale à Atlanta, car mon intention première avait été de visiter la Géorgie et la Louisiane avant de faire notre tour au Costa Rica. À la première heure, je téléphone à l’ambassade à San José dans l’espoir d’en apprendre plus sur le plan de rapatriement. Je n’ai pas beaucoup d’illusions sur les capacités d’organisation de la diplomatie française. Les deux fois où j’avais fait appel à eux professionnellement il y a plusieurs années, à l’occasion de l’exécution d’un contrat en Chine et d’un autre à l’Ile Maurice, les conseillers de ces deux ambassades ne m’avaient été d’aucun secours et même dédaigneux à l’idée de venir en aide à une entreprise, comme s’ils avaient honte qu’on les prenne pour un service public ! Heureusement, leur attitude a évolué et le contexte de pandémie les rend plus conscient de leur importance vis-à-vis de leur compatriote. Mon interlocuteur à San José est très aimable, mais ne sait pas grand-chose. Il s’assure que nous avons bien rempli nos deux fiches de recensement – nous sommes déjà 1 300 à l’avoir remplie. Il me confirme l’arrêt des vols commerciaux d’Air France à compter du lundi 23 mars et attend des consignes de Paris sur le plan de rapatriement avant la fin de la semaine. Nous maintenons notre plan de revenir à l’aéroport le lundi et profitons de ces quelques jours que nous supposons être les derniers au Costa Rica. Nous avons même l’insouciance de plaisanter sur un possible confinement au Costa Rica. Marco et Anayenci nous ont proposé de revenir à Playa Hermosa si jamais nous devions passer plusieurs jours, voire plusieurs semaines au Costa Rica.

Le lundi matin, dès 8h30, je recontacte l’ambassade. Peut-être est-ce le même interlocuteur, il me confirme qu’ils sont deux et n’arrêtent pas de répondre au téléphone jusqu’à 18h. Il y a maintenant 1 500 personnes recensées pour être rapatriées. Il me confirme que 2 ou 3 vols sont prévus dans la semaine sans qu’il connaisse les dates, il ne me cache pas que eux aussi naviguent à vue. Comme je lui rappelle que nous sommes déjà inscrits sur la liste d’attente d’Air France, il me conseille d’aller directement ce soir même au comptoir Air France à l’aéroport pour savoir s’il y a une possibilité de départ ce soir même ou à défaut de nous confirmer sur la liste d’attente pour les vols ultérieurs du plan de rapatriement. Il est temps de refaire nos bagages. Nous avons le temps, il n’y a que trois heures de route par la nationale. Nous prendrons le temps de nous acheter quelques fruits et des enchiladas pour le soir car il nous faudra être avant 19h à l’aéroport pour avoir le temps de rendre la voiture si jamais nous avons la chance de partir. Nous nous arrêterons même au pont de Tarcoles, signalé par le guide, pour voir les crocodiles sommeiller sur les berges du fleuve, flâner dans les boutiques de souvenirs et prendre nos dernières photos des flancs du volcan Poas le long de la route nationale 3.

Crocodiles

 

Nous passons d’abord chez Marco à San José. Si jamais nous avons la chance de partir, il nous faut rendre le téléphone prêté par Anayenci, la glacière que nous avions emportée pour conserver nos denrées périssables durant ces quelques jours, faire le tri dans nos affaires et réorganiser nos bagages en conséquence. Cela nous demande une heure ou deux, à 18 heures nous sommes prêts pour aller tenter notre chance. Je charge la voiture, nous vérifions une dernière fois que nous n’avons rien oublié, puis nous appelons Arturo pour lui rendre la clef de l’appartement de Marco et lui expliquer qu’il y a fort peu de chance que nous trouvions une place dans le vol de ce soir et qu’il doit s’attendre à nous voir revenir vers 21 heures. Il nous accompagne jusqu’au portail, un dernier adieu « pour de faux » en lui disant « à tout à l’heure ». Je n’ai plus de GPS, mais me souviens assez bien du chemin à travers les avenues rectilignes de San José, un plan à « l’américaine » où toutes les rues se coupent à angle droit. Direction : aéroport Juan Santa Maria (je me souviens bien du nom, car la fois précédente, en tapant « aéroport international » sur Google Maps, le GPS m’avait envoyé sur l’aéroport Tobìas-Bolaños, l’ancien aéroport qui est bien plus loin que celui d’où nous devons partir).

Dix-huit heures trente, la nuit est tombée, nous arrivons à destination, je gare la voiture au parking et nous sortons nos deux valises du coffre. Cette fois, masque sur le visage, gel dans la poche, nous partons vers les comptoirs d’enregistrement. Maintenant, la plupart des gens que nous croisons portent un masque et, dans la file d’attente, les voyageurs observent plus ou moins bien la distance de contrôle. La prise de conscience est visible depuis la semaine passée. Pas de grande foule devant le comptoir Air France, un peu tôt pour le vol de ce soir. Je ne vois pas le chef d’escale avec lequel nous avions parlé la semaine dernière, mais je reconnais le jeune homme qui nous avait inscrits sur la file d’attente, mais qui semble occupé pour l’instant. J’attends que les voyageurs précédents aient terminé et m’approche du comptoir en tendant la copie de notre billet de retour et nos deux passeports à la jeune fille de l’enregistrement. Je lui explique que nous sommes sur la liste d’attente.

 

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