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Vivre confinés
13 mai 2020

Fin de partie

 

par Madeleine


 

« Fini, c’est fini, ça va finir, ça va peut-être finir. »

« Oui, c’est bien ça, il est temps que cela finisse et cependant j’hésite encore à ­– à finir. » (Beckett)                                

La lune du 7 mai est énorme, presque rousse, ce soir, et je sais que l’insomnie est là, comme dans le film italien Kaos où un homme hurle à la lune. Les loups aussi. La lune nous regarde, indifférente, puissante.

Ai essayé d’y voir un peu plus clair dans les différentes publications scientifiques glanées au fil des infos, elles se multiplient, sont remises en question comme toute science en train de se faire…

Ai écouté l’appel émouvant de Vincent Lindon qui s’appuie sur les avis du professeur Grimaldi (diabétologue de La Pitié-Salpêtrière). Il se soucie de l’hôpital et des soignants, et de tous les travailleurs grâce auxquels la société fonctionne. Il se scandalise de l’écart grandissant entre les pauvres et les riches et propose une taxe exceptionnelle, baptisée « Jean Valjean », du nom du personnage des Misérables épris de justice. Un impôt qui permettrait aux très riches de rendre un peu de ce qu’ils ont tiré des pauvres et dont ils ne savent pas quoi faire ! Les commentaires à cet appel publié par Médiapart sur Internet sont innombrables et très élogieux : on le remercie, on loue son humilité, on lui dit qu’il est « une belle personne ».

Christophe Rioux écrit dans un Tract de crise (Gallimard) « Assignés à résidence » : « Ce n’est pas moi qui l’ai dit, c’est notre Président. C’était le 20 février 2018, aux Mureaux, la ville en zone urbaine sensible où j’ai grandi. À l’époque, le Président avait eu des mots forts : il avait parlé d’« émancipation culturelle » et avait dénoncé « l’insupportable assignation à résidence » dont souffraient nos banlieues. Avec le recul, les termes étaient prophétiques… Deux ans plus tard, nous sommes tous assignés à résidence. Ou, pour prendre un synonyme en vogue, confinés. Depuis quelques mois, la Nation expérimente à grande échelle le quotidien des banlieues et elle n’en peut déjà plus de ce rétrécissement de l’existence. En temps normal, qu’est-ce qu’être assigné à résidence en zone urbaine sensible ? C’est, tout simplement, la quasi-impossibilité d’en sortir, et, plus largement, de s’en sortir. À moins, peut-être, de rêver à un « New Deal » pour la Culture, qui n’oublierait pas les banlieues. »

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Jean Jouzel et le GIEC, Aurélien Barrau, Juliette Binoche, et tant d’autres rappellent l’urgence climatique : une apocalypse annoncée mais encore évitable, « face au plus grand défi de l'histoire de l'humanité, le pouvoir politique doit agir fermement et immédiatement. Il est temps d'être sérieux... Nous vivons un cataclysme planétaire. Réchauffement climatique, diminution drastique des espaces de vie, effondrement de la biodiversité, pollution profonde des sols, de l'eau et de l'air, déforestation rapide.  Nous considérons qu'un gouvernement qui ne ferait pas du sauvetage de ce qui peut encore l'être son objectif premier et revendiqué ne saurait être pris au sérieux. Nous proposons le choix du politique - loin des lobbys - et des mesures potentiellement impopulaires qui en résulteront. »

Lélia et Sebastiao Salgado lancent un appel désespéré pour tenter de sauver les Indiens de l’Amazonie qui risquent d’être décimés par la pandémie.

Et Alain Damasio, interviewé dans Reporterre : « On vit en démocrature, il faut quand même le réaliser ! Aucune des décisions prises sur cette pandémie n’a respecté la moindre ébauche de débat démocratique. On subit les choix d’un Prince aux yeux crevés. Le seul levier qu’ils actionnent est la peur : sa gestion triviale, son emprise évidente, son aérodynamisme pour pénétrer les corps et les têtes d’une population choquée. Au lieu de faire de la médecine –  c’est-à-dire de tester, d’isoler et de traiter – les macronards ont fait dans le moyenâgeux, la petite terreur quotidienne et le flicage. Ils ont maximisé l’angoisse des citoyens. La « grande » presse, tenue par les milliardaires amis de Macron, joue bien ce jeu. Chaque jour, elle assène en page d’accueil le total des morts. On nous dit 20.000 morts, le lendemain 21.000 morts, et après 22.000 ! Sans jamais relativiser ce que signifie ce chiffre. »

« Bien sûr, quelque chose de plus profond se joue. Ce qui me semble passionnant est que de nombreux malades du Covid-19 ne meurent en réalité pas de la prolifération du virus, mais d’une hypertrophie de la réaction immunitaire. Cet emballement des défenses immunitaires, on la retrouve par analogie dans l’hystérie de notre réaction politique et sociale, qui trahit selon moi un refoulé majeur de nos civilisations actuelles : on ne supporte plus ni la maladie ni la mort. On se rêve dans l’immunité absolue. Le confinement est si bien accepté parce qu’il reconduit cette illusion de la bulle immunitaire. Et il la reconduit pour chaque individu, foyer par foyer, en la vitrifiant dans le numérique, qui est le dispositif idéal de la « distanciation » sociale. »

« Pourquoi l’État sur réagit-il face au terrorisme, se demandait Foucault, alors que le terrorisme fait en réalité extrêmement peu de morts ?  L’État se doit d’apparaître comme le garant de notre sécurité existentielle. C’est ce pacte de sécurité qui fait qu’on en accepte les disciplines et le contrôle. »

« Mais, quoi qu’il en soit, ces politiques sécuritaires ne pourraient pas être mises en place si elles ne répondaient pas à une demande sociale extrêmement forte de contrôle, de réassurance et de « sérénité ». S’il y a une responsabilité dans cette crispation sécuritaire, elle est pleinement collective. »

« Pour le déconfinement, je rêve d’une chose simple : un vrai carnaval des fous, comme au Moyen-Âge, qui renverse nos rois de pacotille. Un carnaval immense, dès le 12 mai. Avec des masques fabriqués, artisanaux, inventifs, et ce mot de désordre : « Stop ! On ne reprend pas les choses comme avant ! On ne reprend pas ce monde tel qu’il est. Gardez-le, ce monde du burnout, de l’exploitation de tous par tous, du pillage généralisé du vivant ! Halte-là ! On ne reprend aucun de vos produits : ils sont périmés ! »

 

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Enfin, une histoire de banderole : Le 24 avril, une jeune femme a été placée en garde à vue durant quatre heures pour « outrage à dépositaire de l’autorité publique » afin de justifier sa prise de position qui s’inspirait directement d’une Une de l’hebdomadaire Charlie Hebdo en date du 29 janvier.

En soutien, de nombreuses banderoles ont fleuri partout en ville mais aussi dans d’autres agglomérations françaises. Et certains militants ont reçu la visite de policiers. « Tout régime d’exception génère des excès, cette histoire de banderole est révélatrice, on voit fleurir des tentatives de faire taire », avait déploré Maître Pascal Nakache de la section toulousaine de la LDH, à l’origine d’un courrier au procureur de la République, Dominique Alzéari.

Ce dernier a informé par courriel « que le dossier des personnes placées en garde à vue ou contrôlées par la police pour avoir affiché des banderoles portant la mention « Macronavirus : à quand la fin ? » était clôturé et ne donnerait lieu à aucune suite », s’est félicité la Ligue dans un communiqué. Précisant qu’elle demeurerait « néanmoins extrêmement vigilante à l’égard de toute forme d’atteinte à la liberté d’expression, le libre débat et les polémiques étant constitutifs de l’un des fondements de toute société démocratique ».

Cet incident fait l’objet d’une intervention vidéo passionnante (comme toujours) du philosophe de Strasbourg, Jean-Luc Nancy, sur le blog qui vient d’être créé par Jérôme Lèbre : « Philosopher en temps d’épidémie ».

Une belle méditation sur la liberté !

 

 

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