Un temps d'exception - Mars-Avril 2020 (1)

par Roseline C.

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Dans ce texte je vais tenter d'aborder des thèmes de la vie quotidienne en temps de confinement. Qu'est-ce qui a changé, s'est transformé, ajouté, réduit ? Il ne s'agit pas d'une analyse mais plutôt d'un état des lieux de ce qui constitue mon quotidien. En quoi son contenu est-il différent pour moi qui ne travaille plus depuis une dizaine d'années ?

          Première décision le mardi 17 mars 2020

Dès le premier jour du confinement j'ai ouvert un cahier donc écrit manuellement, je n'ai pas voulu m'infliger la contrainte de l'outil informatique. Je le voulais facilement accessible, à n'importe quel moment, dans n'importe quelle pièce de l'appartement. Dans ce cahier je consigne mon quotidien, il est davantage factuel que réflexif, je le transporte avec moi. Chaque jour je note l'heure de mon lever et l'heure de mon coucher, entre ces deux moments tout ce qui se présente, conversations téléphoniques, lecture d'articles, repas, films, sorties ; prises de note en écoutant une émission, une lecture, quelques réflexions après une conversation, lectures, un rêve de temps en temps… Plus de détails apparaitront à travers les thèmes que je vais développer.

Pour la tenue de ce cahier je me suis inspirée de Pierre Bergounioux que j'ai entendu, en novembre 2019 à la matinée du journal de l'APA, parler de ses Carnets. Il note précisément ce qu'il fait. Ils sont "la possibilité d'éclaircissements ultérieurs, une mise en sûreté ; on n'a plus besoin de s'appuyer sur la mémoire, on se libère, on peut se détendre." Mon idée, après ce temps d'exception était de garder une trace la plus précise possible de ce à quoi j'ai vraiment employé mon temps tout au long de ces journées sans voir personne ou presque, seule face à moi-même. Et ainsi "ne pas toucher à ce qui a été tout chaud écrit", comme le dit Pierre Bergounioux.

A ce jour j'ai démarré un deuxième cahier. Ces deux cahiers m'ont été  offerts par une amie suite à deux de ses voyages, le premier en 2014 vient du Laos, le deuxième en 2017 vient du Sri Lanka.

          Le lieu

Je confine seule dans un appartement de 83 m² avec deux balcons. Un appartement dans lequel je me sens bien, très clair, vraiment très agréable. Un confinement dans le luxe.

          Une précision de vocabulaire.

Quand j'ai commencé à entendre l'utilisation du verbe "confiner", je me suis interroger parce je connaissais "se confiner ou être confiné" donc je suis allée ouvrir mon dictionnaire (oui Le Petit Robert papier) pour me plonger dans l'utilisation de la langue française. C'est ainsi qu'au jour 3 du confinement j'ai noté les définitions suivantes :

          Confiner  - Verbe transitif - (1464) - de confins

          1- (1466) Toucher aux confins, aux limites d'un pays. La Belgique confine à, avec la France. – Être tout proche, voisin de. Les prairies qui confinent à la rivière. – Fig. « La rêverie confine au sommeil et s'en préoccupe comme de sa   frontière. » (Victor Hugo) → côtoyer, friser.

          2 - (1477) Forcer à rester dans un espace limité → enfermer, reléguer.« Cette espèce de retraite forcée ou des circonstances passagères me confinent » (Sainte-Beuve).

          3 - Se confiner - Verbe pronominal Se confiner chez soi → se cloîtrer, s'isoler, se retirer. – Fig. Se confiner dans un rôle → se cantonner.

Après cette étude approfondie j'ai décidé de continuer à écrire "je confine", je n'ai pas décidé de cette situation ; même s'il serait plus juste d'écrire "je suis confinée".

        
  La gestion du temps

 Depuis dix ans que je ne travaille plus, j'ai appris à gérer mon temps librement, participations à des associations, cinéma, théâtre, expositions, diverses rencontres publiques, balades, restaurants, rencontres entre ami.es… La vie. Je peux prendre le métro deux à trois fois par jour si nécessaire.  Et le 17 mars stop, plus rien.

L'amplitude horaire de ma journée s'est un peu raccourcie, les soirées sont plus courtes. Lever entre 6h30 et 7h - Coucher (extinction des feux) entre 23h et minuit. Je tiens à ne pas désorganiser mon temps, pour moi c'est rester dans la vie réelle. Le début de la matinée est proche de mon rythme habituel, en prenant le petit déjeuner, écoute de la radio, lecture de revues. Vers 9h je suis douchée, habillée, prête à commencer ma journée.

          Les rituels : des activités qui ponctuent toutes les journées.

- Chaque matin j'appelle ma mère et mon frère qui habitent à Paris, j'écoute la lettre lue par Augustin Trapenard sur France Inter.

- Dans la journée j'écoutais le journal de Wajdi Mouawad, un quart d'heure de délicatesse, de sensibilité, d'émotion. Sa voix enveloppante me transportait. Un moment de sérénité, bercée par le récit. Malheureusement il a arrêté le lundi 20 avril, décidant de continuer à écrire mais dans le silence. Ce rendez-vous me manque.

- Je me suis remise à écrire à partir d'inducteurs qu'avaient créés Daniel O. il y a déjà longtemps sur le wiki. Il s'agit d'écrire pendant 10 mn chrono à partir de cet inducteur dès qu'on l'a ouvert. Cette contrainte m'aide à amorcer des textes que je reprendrai peut-être un jour.

- Les repas pris devant les informations à la télévision. Depuis toujours je ne peux pas manger seule à ma table. Je n'aime pas non plus faire la cuisine, en temps normal j'oublie parfois de penser à mes repas, je bricole en vitesse quelque chose. Aujourd'hui c'est devenu un temps dédié, je fais des courses en fonction de ce que je pense cuisiner et anticipe le temps de préparation. Rien d'urgent ne m'appelle ailleurs.

- À 20 heures j'applaudis depuis mon balcon. Dans mon immeuble nous sommes très peu à le faire, en connivence avec ma petite voisine d'en face avant de rentrer nous nous envoyons un signe de la main. À demain.

          L'habillement

Le confort est essentiel. Choisir des vêtements qui ne serrent pas, qui permettent d'être à l'aise pendant les nombreuses heures de position assise ; donc des vêtements confortables, souples, larges tout en répondant à une certaine esthétique. J'en profite pour remettre certains vêtements assez anciens mais que j'aime beaucoup auxquels je redonne un peu de vie. Ne pas oublier les boucles d'oreille. Pour sortir j'opte pour un pantalon de ville et baskets pour marcher dans de bonnes conditions pendant le peu de temps dont je dispose.

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(à suivre)