La mesure du temps

Avant-hier (enfin, je crois…), Bernard parlait ici de « structurer le temps », ce temps nouveau, différent, qui nous est imparti.

Cela me semble essentiel en effet. En temps normal, l’occupation de notre temps est largement déterminée par des activités extérieures dont le créneau horaire ne dépend pas de nous, que ce soit au plan du travail ou des loisirs. Ensuite on se débrouille pour caser le reste de ce qu’on a à faire… dans le reste du temps.
Maintenant on a devant nous une sorte de temps flou et imprécis qui peut se remplir n’importe comment. On pourrait être tenté (comme j’entendais le psychologue Christophe André le dire hier soir sur les étranges lucarnes) de dormir le jour et regarder des vidéos toute la nuit – surtout les gens qui sont seuls : qu’est-ce que ça changerait ?

Il me semble que ce serait simplement l’exercice d’une sorte de liberté fallacieuse. J’ai conservé sur mon bureau mon agenda papier, qui habituellement réside dans mon sac. Les éléments, rencontres, rendez-vous prévus pour les prochaines semaines sont annulés. Et pour le moment il ne peut s’en inscrire de nouveaux. Mais je le garde sous les yeux parce que cela m’aide à appréhender – au sens de saisir – le temps du confinement.

« Quel mois sommes-nous dans la semaine ? » se demande Arnaud Maisetti. « Depuis le 16 mars, le 16 mars recommence ici chaque matin de chaque jour. »

En même temps j’ai du mal (comme beaucoup d’entre nous je suppose) à me situer dans cet écoulement informe. L’ordinateur donne obstinément la date, 27/03/2020, mais ce matin ça a été difficile de trouver que c’était vendredi.

Ce qui me fait penser à l’histoire des deux hippopotames qui marchent côte à côte au bord de leur fleuve favori, et au bout d’un moment l’un d’eux s’arrête et dit à l’autre : « Et quand je pense, Maurice, qu’aujourd’hui c’est vendredi… »

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Elizabeth LC